UFR Lettres, Arts,
Cinéma
Université Paris 7
Site Paris Rive-Gauche
« Grands
Moulins »
Salle Pierre Albouy
6e étage,
Salle
75013-Paris
Comité
scientifique :
José-Luis Diaz,
Claudine Grossir, Michèle Hecquet, Jean-Yves Mollier, Nicole Mozet, Michelle
Perrot, Christine Planté, Marie-Ève Thérenty.
La
pensée sociale de George Sand a déjà fait l'objet de nombreuses études, mais
rares sont celles qui s'intéressent directement à la question de l'argent :
l'ouvre romanesque, au contraire de celle de Balzac ou de Zola, ne lui a pas,
semble-t-il, accordé une place centrale. Des réticences idéologiques - le
socialisme de George Sand est perçu comme plus idéaliste et social
qu'économique, sa qualité de femme lui dénie toute compétence dans le domaine
financier - expliquent cette apparente discrétion.
L'ambivalence des discours de l'écrivaine à ce sujet, oscillant entre défense
de ses intérêts, mépris et libéralités contribue à brouiller les pistes et à
accréditer les préjugés.
L'objet
de ces journées d'étude est donc de combler cette lacune et d'envisager cette
question, tant dans l'ouvre romanesque, autobiographique, que les articles ou
la correspondance.
Un
premier éclairage porte sur l'expérience personnelle de la gestion financière
de George Sand qui intéresse l'historien de la littérature : les relations
avec les éditeurs Buloz, Lévy, Hetzel en particulier,
avec les directeurs de théâtre, les contrats, permettent de cerner l'évolution
des revenus de l'activité intellectuelle de George Sand, l'accélération au
cours du siècle de la marchandisation du livre, les liens qui unissent roman et
théâtre dans la vie culturelle du Second Empire ; la gestion des
propriétés familiales, de Nohant en particulier, permet d'observer comment
s'articulent questions d'argent et relations familiales, particulièrement lors
des périodes de crises : argent et propriété sont ici au cour de questions
d'identité, de possession et de dépossession de soi, qui confèrent aux biens
bien plus qu'une valeur marchande ; l'argent enfin chez George Sand entre
dans une économie communautaire dont elle est une inlassable pourvoyeuse : ses
bénéficiaires (Pierre Leroux, Agricol Perdiguier et
bien d'autres) mais aussi ses bailleurs de fonds (Victor Borie par exemple)
forment une communauté mouvante fondée en partie sur la circulation de
l'argent.
Un
second axe de travail cherche à montrer comment sous la forme de la dot, de l'héritage,
de la gestion du patrimoine, des pensions, des dettes et des emprunts, de la
ruine, l'argent se trouve au cour de l'organisation et des relations
matrimoniales et familiales proposées dans les romans, et offre ainsi, une
image des fondements et du fonctionnement de la société au XIXe
siècle : l'économie familiale n'est jamais sans rapport avec un modèle
économique et social (Le Meunier d'Angibault, Nanon)
façonné aussi par les revenus du travail, domestique, ouvrier, artistique. Les
romans cherchent alors à promouvoir un bon usage de la richesse, qui condamne
aussi bien l'avarice que l'usure et la spéculation, recycle éventuellement
l'argent acquis frauduleusement et permet de proposer un contre-modèle
à l'essor du capitalisme (Le Péché de
Monsieur Antoine,
Un troisième champ de réflexion s'intéresse aux
relations que le discours théorique de George Sand sur l'argent, tel qu'on peut
le lire par exemple dans les articles politiques publiés dans L'Éclaireur de l'Indre sous la plume du
personnage de Blaise Bonnin, ou dans les Bulletins de
14h Accueil des participants
1 - L'économie domestique en fiction
Présidence : Claudine Grossir
14h30-15h: Claire Le Guillou
« La famille de Germandre ou le roman de l'héritage »
15h-15h30: Simone Balazard
« De quoi vivent-elles ? » (sur Indiana, Isidora, Flavie, Francia)
15h30-16h: Discussion
2 -
L'économie socio-politique entre fiction et réalité
Présidence : Michelle Perrot
16h-16h30: Romain Piana
« Le Plutus de George Sand : une allégorie socio-économique »
16h30-17h: Marie-Claire Vallois
« Fanchette (1843) : réflexions sandiennes entre l'économie politique et la fiction pastorale »
17h-17h30: Discussion
17h30-17h45: Conclusion
et « Pot » amical
Résumé des communications
Claire Le Guillou ,
« La famille de Germandre ou le roman de
l'héritage »
Le
thème de l'héritage est récurrent dans l'ouvre sandienne
et s'avère très protéiforme. L'héritage est un moteur romanesque, un ressort
dramatique, et même un deus ex machina.
Cette
manne financière, espérée ou non, voire convoitée, permet l'épanouissement
artistique dans Le Château des Désertes,
le bonheur social dans
Suite
au décès du Comte de Germandre, tous ses héritiers se
retrouvent dans son château pour assister à la lecture de son testament. De
manière classique, ce huis clos familial permet à
George Sand de brosse une peinture sociale de l'aristocratie. De manière tout
aussi classique, ce problème d'héritage et de niveau de fortune conditionnent les projets matrimoniaux de ce roman.
Néanmoins, ce roman est selon nous
particulièrement original. L'héritage y est présenté comme une réelle
épreuve initiatique. Hériter est synonyme de passer l'épreuve du Sphynx, de percer le secret du vieux comte. Ici, hériter ne
demande plus seulement des vertus morales, mais aussi des compétences
intellectuelles. L'héritier sera donc celui qui sera l'heureux possesseur d'une
solide connaissance du passé, porteur d'un héritage «archéologique ». De
ce fait, l'héritage n'est plus perçu comme un moment de rupture, mais comme une
continuité familiale et historique.
Nous
nous proposons d'étudier ce roman au regard des quelques pistes évoquées
ci-dessus.
Simone Balazard,
« De quoi vivent-elles ? »
En
suivant la trajectoire de quatre héroïnes éponymes (Indiana, Isidora,
Flavie, Francia), nous allons nous poser cette simple question en tenant
compte de deux paramètres : la date de parution du livre correspondant, et
la date de l'action.
Les
quatre romans ont été choisis selon deux critères : porter le prénom de
l'héroïne, couvrir à peu près toute la production de l'auteure
( 1832-1845-1858-1871).
Du
premier roman signé par George Sand (Indiana) au saisissant portrait
d'un Paris sous la botte russe (Francia) en passant par les deux romans
intrigants que sont Isidora (plutôt sombre) et
Flavie (plutôt gai), nous allons tenter de clarifier le rapport de ces
femmes à l'argent (source, usage, dépendance ou liberté).
Romain Piana : « Le Plutus de George Sand, une allégorie
socio-économique »
Cette
communication se propose de lire l'« étude d'après le théâtre
antique » que George Sand publie dans
Marie Claire Vallois :
« Fanchette (1843):
réflexions sandiennes entre l'économie politique et
la fiction pastorale »
Fanchette (1843) a été une publication sandienne
peu commentée du point de vue textuel et idéologique, tout au moins jusqu'à sa
redécouverte et son analyse par Michelle Perrot dans les deux ouvrages, Politique et polémiques (Imprimerie
nationale,1997) et Les Femmes ou les
silences de l'histoire (Flammarion,1998). Ce curieux texte nous semble
symptomatique, par son sujet et par son
écriture, d'un moment de déchirement inaugural dans l'ouvre sandienne
entre écriture journalistique et écriture romanesque. Il s'agit d'un texte
pluriel (sans nom d'auteur proprement dit) et bâtard à plus d'un point de vue,
qui se trouve intitulé, pour la publication en brochure libre en 1843, du
nom de la'victime,' sujet, objet et héroïne du'fait divers': Fanchette. Cette brochure, composée d'une série de six
lettres, les unes fictives (Lettre de Blaise Bonin à Claude Germain), les
autres authentiques (lettres de George Sand, lettre du procureur du Roi à
George Sand et l'argent
Seconde
session : 1er et 2 février 2008